Final Fantasy (Nes)
Plusieurs versions
Il existe plusieurs versions du jeu, et toutes ont des défauts.
Ainsi, sur PSP, malgré de beaux graphismes et de belles musiques, le jeu souffre de se résumer à une longue balade, tant la difficulté y est basse. L'expérience et l'or abondent, les statistiques sont plus que jamais en faveur des personnages-joueurs, et des objets au nombre d'utilisations infini permet de lancer sort sur sort, et notamment de soin, et tout cela fait qu'à aucun instant on n'a l'impression de lutter pour sa vie en épuisant ses dernières forces lors de voyages semés d'embûches que seule la persévérance permet de dépasser. Autant dire que l'âme du jeu dans sa première version sur Nes a été sacrifiée, au nom de la confortable nostalgie.
(Et je ne mentionnerai pas les donjons optionnels qui ont été ajoutés, et qui n'ont ni queue ni tête, et qui sont une honte pour tout level-designer qui se respecte.)
La version GBA n'est pas différente, mis à part les graphismes et la musique techniquement plus limités. Et version GBA comme PSP sont basées sur une version PS1, qui a d'abord existé sur Wonderswan, qui elle propose une difficulté plus élevée (similaire à l'original) mais une palette de couleurs à mon sens affreuse.
Quant à la version Nes, je l'avais essayée il y a quelques années, mais je l'avais estimée injouable, à cause de la lenteur des combats, dont les messages mettaient beaucoup trop de temps à s'afficher. Or il s'avère que je n'avais simplement pas lu l'option, à l'écran-titre, qui permettait, en appuyant sur select, de sélectionner différentes vitesses d'affichage des textes. Mea culpa !
Toujours plus haut, toujours plus fort
En reprenant le jeu cette fois-ci, j’ai eu du mal à m'arrêter, et je l'ai terminé en quelques jours à peine, en éprouvant un immense plaisir à chaque minute. Il faut dire que déjà, je le considérais sur PSP comme un des meilleurs RPGs existants, malheureusement entaché de défauts graves, qui s'avèrent inexistants sur cette version Nes !
La plus grande force de Final Fantasy, c'est l'impression de progression constante qu'il nous propose. Progression des statistiques des personnages, bien entendu, progression géographique (explorer de nouvelles terres, acquérir de nouveaux moyens de locomotion), progression personnelle aussi, des personnages, qui vivent un véritable parcours initiatique : ainsi, au terme d'une longue quête optionnelle, peuvent-ils changer de classe, ce qui est représenté par un nouveau sprite les représentant non plus comme des adolescents, mais comme des
adultes - ce qui, soit dit en passant, rend plus crédible la progression des statistiques, puisqu'on se rend compte qu'elle a pris du temps, ces années durant lesquelles ils ont parcouru la terre entière. Certes, d'autres RPGs utilisent ces procédés, mais Final Fantasy, tous les aspects du jeu sont orientés dans le sens de cette progression constante, qui me semble être de ce fait le propos même du jeu (la persévérance permet la progression, qui permet d’atteindre les objectifs qu'on se donne).
Des choix de game-design qui auraient gagné à être respectés
Le fait d'avoir baissé la difficulté dans les remakes suggèrerait qu'elle est trop élevée dans l'original. Ça n'a pas été mon impression. Aucun combat ne m'a paru insurmontable, et une seule fois j'ai ressenti le besoin de faire du grind, et encore, à ce stade du récit, ça ne m'était pas apparu comme une interruption, mais comme la suite logique (j'allais affronter le premier des quatre gardiens des cristaux).
Par ailleurs, les combats aléatoires sont bien mieux gérés. J'ai l'impression que la fréquence est la même que dans les remakes, mais un détail fait toute la différence : toutes les maps ont été augmentées par la suite, ce qui fait qu'on se retrouve, sur PSP par exemple, à faire plus de combats pour un donjon donné par rapport à la version Nes. Et finalement, la fréquence elle-même semble plus élevée, car pour traverser ces plus grands espaces vides, la possibilité a été ajoutée de sprinter, ce qui accélère d'autant l'irruption d'un combat, et ainsi, on se retrouve constamment interrompu, dans des donjons qui n'en finissent pas. Et tous ces problèmes sont absents sur Nes, où je n'ai jamais ressenti de lassitude.
Une des facilités apportées dans les version suivantes a été l'augmentation des ressources (PV, PM, Or, Exp). Et pourtant, leur rareté servait, elle aussi, la logique du récit. On incarne tout de même des personnages qui bravent le danger au péril de leur vie, au cours d'une longue et épuisante quête. Et cet épuisement, la nécessité d'endurer, on ne le ressent que sur Nes.
En ce qui concerne l'or, sa rareté apporte également de la stratégie, puisque, les objets, l'équipement et les sorts étant coûteux, il s'agit de choisir avec attention lesquels se procurer d'abord. C'est même un aspect très important du jeu, puisqu'on le retrouve également dans la gestion des sorts : chaque personnage ne peut connaître qu'un nombre limité de sorts par niveau de sorts, à la Donjons et Dragons (pour être précis, les sorts sont classés par 8 niveaux de puissance, chaque niveau en proposant 4 de magie blanche, 4 de magie noire, et sur ces 4 ou 8, le personnage ne peut en connaître que 3). De plus, le nombre de pièces d'équipement pouvant être emporté est limité à 4 armes et 4 pièces d'armure par personnage, et cela en comptant ceux qu'ils portent effectivement (c'est-à-dire qu'un guerrier en armure, casque, bouclier et gants ne peut emporter aucune pièce d'armure de réserve).
Ce qui implique d'ailleurs un enjeu majeur. J'avais dit qu'il existait des objets permettant de lancer des sorts sans limite d'utilisation. Sur Nes, ils sont tout d'abord infiniment plus précieux, la magie étant une ressource très limitée sinon. Mais surtout, ces objets sont des pièces d'équipement, ce qui signifie que 1) le nombre d’objets magiques que l’on peut emporter est très limité 2) cela se fait éventuellement au détriment de meilleures pièces d’équipement 3) seul celui qui emporte avec lui la pièce d’équipement peut l’utiliser : impossible, donc, pour un guerrier, d’utiliser un bâton de soin pour soigner les gens par exemple, ce qui bien entendu n’est pas très role-play.
Un dernier changement tout bête, et à mon avis inutile, puisque là encore il diminue le nombre de choix à faire : les personnages joueurs changent automatiquement de cible si l'ennemi qu'ils ciblent meurt avant qu'ils n'exécutent leur action. Sur Nes, les personnages tapent dans le vide dans ce cas là, et c'est la responsabilité du joueur de bien estimer ce qu'il reste de points de vie aux adversaires pour répartir au mieux ses attaques.
Un jeu bourré de bugs, et de bonnes intentions
Je souhaite soulever encore un dernier point : le nombre ahurissant de bugs dont souffre le jeu. Je ne parle pas de bugs rares qui ne se produisent que dans des circonstances très particulières. Ce sont des bugs au contraire tristement banals.
La première série concerne les armes. Certaines d'entre elles, puissantes en milieu de partie, moyennes en fin de partie, sont supposées conserver leur intérêt grâce au bonus de dommages dont elle bénéficient contre certains types d'ennemis (géants, dragons, morts-vivants, etc.). Il se trouve que ce bonus n'est tout bonnement pas appliqué, ce qui rend cette profusion d'armes (un tiers au moins du nombre total) perdent de cette manière leur raison d'être.
Une deuxième série de bugs concerne les sorts, dont un bon tiers là encore ne fonctionne pas (principalement ceux qui infligent des altérations de statut) ! Et c'est d'autant plus graves, parce que ce sont des sorts coûteux à acheter, et que le nombre de sorts que chaque personnage peut apprendre est limité, et qu'ils ne peuvent pas être oubliés. Si je n'avais pas consulté de guide, j'en aurais certainement acheté, et les regrets m'auraient gâché ma partie.
On peut se demander POURQUOI tant de bugs ont pu passer dans la version finale.
- Une des raisons, je pense, est que tester des jeux à l'époque, c'est dur ! Avec RPG Maker, c'est un jeu d'enfants de débuguer quelque chose. On peut modifier le jeu et le tester dans la foulée, on peut changer la position de départ du héros pour aller directement au bon segment, on a accès à un menu de debug répertoriant les valeurs de nos variables... C'était autrement difficile à l'époque, surtout pour des bugs difficiles à évaluer, comme le bonus de dommages contre tels adversaires (sachant que les stats des persos varient de partie en partie au moment de la rencontre) ou les chances d'inflictions de statuts (la chance ou la malchance peut jouer beaucoup, même quand il n'y a pas de bugs).
A ce propos, j'ai lu un jour, dans une interview de Yuji Horii à propos de Dragon Quest 2, qu'ils s'étaient rendu compte en fin de développement que leurs ennemis étaient beaucoup trop durs : ils s'étaient référés à leur expérience du développement de Dragon Quest 1, où les combats se font à 1 contre 1, mais en passant à des combats de 3 contre 1 à 9, l'équilibrage des combats étaient extrêmement différent ! Ils ont dû donc, dans les dernières semaines, travailler d'arrache-pied à tester, prendre des notes, intégrer les changements, charger la rom sur des cartouches, re-tester, et ainsi de suite. Mais à la toute fin, ils se sont rendu compte que personne n'était allé jusqu'au bout du jeu, forcément, vu qu'ils étaient sans arrêt obligés de recommencer depuis le début. Et le jeu est donc sorti dans un état d'après eux honteux, parce qu'ils étaient obligés, et de fait, le dernier segment de world-map et le dernier donjon sont injouables, avec une difficulté qui s'envole et des level ups qui se mettent à stagner.
- Une autre raison serait que Final Fantasy était supposé être le dernier jeu du studio, et j'imagine qu'ils ont dû finir par manquer de moyens, et ne pas pouvoir prolonger le développement du jeu sous peine de faire faillite, ce qui expliquerait ce manque de finitions.
Conclusion
Quoi qu'il en soit, malgré les bugs le jeu est parfaitement jouable, si ce n'est qu'il est d'autant plus classique que l'on doit se priver des sorts les plus techniques (et donc utiliser essentiellement des soins et des dégâts directs). Et une fois la vitesse d'affichage correctement réglé, on découvre un jeu très agréable à jouer, très bien structuré, et le plus conforme à ses intentions, contrairement à ce qu'il est devenu dans les remakes qui ont suivi.
Jouez-y ! (Ainsi qu'à Dragon Quest 1.)