CHAPITRE 2 : Le haut-marché et le bas-marché
N.B. : les termes "haut-marché" et "bas-marché" apparaissent dans cet article. Ce sont deux expressions propres à cette traduction, traduisant les termes "upmarket" et "downmarket". La traduction exacte serait "marché haut de gamme" et "marché bas de gamme", qui présentent deux difficultés : lourdeur dans certaines constructions de phrases, et surtout "bas de gamme" est bien trop péjoratif : en plus d'exprimer l'idée de "bon marché" ou "populaire", il exprime l'idée de "mauvais qualité" absente du propos de l'auteur.
Il n'y a pas de joueur "casual". Il n'y a pas de joueur "hardcore". Il y a seulement le haut de gamme et le bas de gamme. Le marché populaire et le marché de luxe.
Pour n'importe quel produit, il y a
un lot d'obstacles qui doivent être écartés afin que le produit puisse être
apprécié. Certaines personnes, surtout celles qui sont à l'aise avec la technololgie, peuvent franchir ces obstacles plus facilement que d'autres.
Voici la courbe "Featuritis".
"Featuritis" signifie l'ajout de caractéristiques techniques à un logiciel (jeu, programme...), dans le but de l'améliorer, mais dont l'accumulation peut aller jusqu'à nuire au but premier du dit logiciel.
Comparez le graphique ci-dessus avec l'expérience des consommateurs de jeux vidéo. Les jeux simples de l'époque Atari sont devenus indéniablement plus complexes. Pour ceux qui ont grandi avec les jeux vidéo, ils ont pu accroître leur expérience et porter plus loin le point culminant de la courbe indiquant le seuil de plaisir. Ces joueurs, qui se donnent le nom de joueurs "hardcore", sont devenus le marché haut de gamme.
Beaucoup de gens n'ont pas grandi avec les jeux vidéo ou ont arrêté d'y jouer après l'Atari 2600 ou la NES. Regardez le graphique et imaginez leurs réactions quand ils jouent aux jeux d'aujourd'hui. Forcément, ils seront frustrés de devoir lire le manuel, se trouveront nuls, et concluront en général que les jeux vidéo ne sont pas pour eux. Quelqu'un qui se satisfait du jeu
Pong ne sera pas prêt à embarquer direct dans un jeu 3D immense.
Quand les joueurs du haut marché voient les jeux dits "casual" ou bien les jeux du passé (comme les classiques sur la Virtual Console), ils se disent
"Cool, mais j'aurais aimé un peu plus..." Ces jeux ne sont pas assez élaborés pour eux. Avec le tennis de
Wii Sports, les joueurs du haut marché disent
"le jeu est cool mais j'aurai aimé contrôler le personnage moi-même" ou avec
Wii Play ils repètent
"C'est sympa mais les mini jeux sont trop simplistes" ou au sujet des vieux jeux on entend
“Télécharger Mario Kart 64
est cool mais j'aurai aimé qu'ils y ajoutent un mode online et des nouvelles courses…”
De toute évidence, le seuil de plaisir des joueurs du haut marché et du bas marché est différent (ainsi que pour le mélange varié de joueurs entre les deux). Afin de simplifier, occupons-nous des deux extrêmes et voyons comment s'illustrent leurs expériences :
Laissez-moi vous poser une question, en tout honnêteté. Prenez vos jeux favoris ou, plutôt, les jeux qui vous ont donné une bonne impression initiale. Combien de temps vous a-t-il fallu pour vous trouver bons ?
En général, peu de temps.
Richard Garriott, surnommé Lord British, a révélé il y a plusieurs années (à l'époque où le studio Origin Systems existait encore) pourquoi
Diablo et les RTS comme
Red Alert et
Warcraft 2 étaient devenus si populaires. Pour Diablo, c'est parce qu'on passe très rapidement des niveaux au départ. On se sent balèze assez tôt, ce qui encourage à continuer. Pour les RTS, c'est pareil, avec les première missions de
Warcraft 2 et
Red Alert qui sont très simples (la première mission Soviet de
Red Alert demande simplement au joueur de cliquer là où il veut que les avions bombardent). N'importe qui ayant joué à
World of Warcraft peut se rendre compte que le jeu nous fait rapidement nous sentir puissants au cours des dix premiers niveaux. Les autres MMORPG débutent de manière beaucoup plus lente, ce qui peut expliquer leurs ventes moins fulgurantes.
Ces joueurs du bas-marché, si on s'occupe d'eux de la bonne manière, vont s'élever progressivement pour devenir des joueurs du haut-marché. (Il s'agit ici de "l'Upstream" souhaité par Nintendo grâce à la Wii.) Les débutants de
World of Warcraft deviennent souvent les joueurs les plus acharnés. Plein de gens ont eu comme premier RTS des jeux comme
Command and Conquer,
Warcraft 2. Ils ont joué aux premiers niveaux, les plus faciles, et ont gravi l'échelle pour chercher plus sophistiqué. (Il faut noter que
World of Warcraft,
Warcraft 2,
Red Alert, et
Diablo sont faits pour prendre avantage de ce fait. Les premières unités ou choix que le joueur a à sa disposition sont simples mais avec le temps cela devient plus complexe.) Miyamoto était surpris de voir que les premiers jeux DS, très simples, qui se jouaient essentiellement avec l'écran tactile, avaient permis à des joueurs de monter les échelons pour jouer ensuite à
Mario Kart DS et
New Super Mario Brothers, qui ont tous les deux eu des records de ventes extrêmes.
A SUIVRE...
Dans le
Chapitre 3, il sera question de l'Upstream, le fait de faire grimper les échelons aux joueurs, et des jeux qui en font partie. Et pourquoi avec les années l'industrie a délaissé les jeux du bas-marché cessant par conséquent la possibilité de l'Upstream.