alors qu'il s'agit d'une application directe du phénomène d'utilité marginale décroissante, un pré-supposé de la théorie économique classique
Peux-tu parler plus simplement ?
Le phénomène d'utilité marginale décroissante. Imagine que tu ais très faim. Tu manges un bout, tu éprouves un plaisir immense, et cela est très "utile" pour ton corps. Tu mange un autre bout, le plaisir augmente toujours, un peu moins. Encore un bout, tu es contente de manger. Encore un bout, tu commences à être rassasiée. Encore un bout, c'est de la gourmandise.
Si le plaisir global augmente, l'utilité de chaque bout, le plaisir éprouvé, diminue à chaque fois (on dit qu'elle diminue marginalement, à chaque fois qu'on ajoute quelque chose). Cette utilité est donc décroissante. L'auteur de l'article applique ce phénomène aux features d'un jeu vidéo. Chaque feature augmente un plaisir global, mais l'augmentation est de moins en moins grande.
Au bout d'un moment, un bout supplémentaire de nourriture te rend pale. Puis malade. Le plaisir global commence à diminuer à chaque fois que tu ajoutes un bout. Idem avec les features de jeu vidéo.
Ce phénomène a été modélisé, pour devenir une base théorique de l'économie classique, que l'auteur connait bien d'après ce que tu as dit Magnolia. Il s'applique à de nombreux cas : le nombre de personnes dans une cuisine (le nombre de personne augmente la vitesse de confection des plats, mais si y'a trop de monde, les gens se gênent), le personnel d'un projet ou d'un organisation (où la bureaucratie nécessaire à la gestion des gens ralentit la production)... Néanmoins, l'auteur ne peut pas ignorer qu'il y a de nombreux cas où cette théorie ne s'applique pas. Et ces cas se retrouvent aussi dans le jeu vidéo. J'en donnais quelques-uns :
flow, statut de l'apprentissage dans le jeu vidéo, jeu à haut niveau...
Le flow est un phénomène qui peut être défini comme un chemin idéal où la difficulté et la maîtrise (c'est à dire l'ensemble dynamique complexité-apprentissage*) augmentent à la bonne vitesse. Le joueur est porté par sa progression dans le jeu, ne voit pas le temps passer et s'immerge complètement. Selon le modèle de l'auteur, le flow ne peut pas exister : il y a forcément un moment où soit la difficulté, soit la complexité vont faire diminuer le plaisir du joueur. Je dis donc que ce modèle n'est pas suffisant pour expliquer un phénomène complexe, comme le flow.
Spoiler: |
| Par "ensemble dynamique complexité-apprentissage", je veux dire que quand un jeu se complexifie, en réaction, on apprend à gérer cette complexité. Si le jeu est bien fait, il ajoute au moment où on commence à maîtriser une nouvelle dose de complexité. Ce phénomène d'action/réaction entre la complexité et l'apprentissage est la définition que j'ai trouvé pour le concept de "maîtrise" (skill en anglais), qui me paraît pas super clair (et un peu absurde : quel est l'intérêt de "maîtriser" un jeu ?). C'est pas forcément une bonne définition. |
Le jeu à haut niveau peut être vu comme l'équivalent du marché de luxe en économie classique. Il s'agit d'un marché où l'utilité marginale n'est pas décroissante. Plus je possède des bijoux, plus je suis content et plus je veux posséder des bijoux encore plus chers. Dans le jeu à haut niveau (mode épique dans Wow par exemple), plus je possède du stuff puissant, plus je veux faire des raids difficiles et frustrants, qui demandent des tactiques de plus en plus complexes, pour posséder du stuff encore plus puissant.
Ses graphiques sont simples, mais complets, plus d'infos reviendrai à tomber dans le piège du featuritis justement.
Ces graphismes sont simples et utiles pour mettre en évidence un phénomène, celui de l'utilité marginale de la feature pour le joueur débutant (habitué ou non au jeu vidéo). Mais ce phénomène n'est pas toute la réalité.
(Et encore, le second graphique n'est pas si simple. Si tu essayes de faire le lien entre le premier et le second, et que tu essaye de voir comment il construit les fonctions du graph 2, tu vas te rendre compte qu'il manque des informations.)
Car il s'agit bien là d'un article sur quelque chose d'essentiel et de finalement très simple. Mais que la plupart des joueurs ignorent du fait qu'ils sont trop plongés dans ce monde et ne peuvent pas y porter un regard extérieur.
Y'a ptet quiproquo là dessus. Pour moi cet article était adressé aux gamedesigners et pas aux joueurs. Du coup je trouvais malhonnête d'utiliser des connaissances partielles d'économie, qui risquent de fourvoyer les concepteurs. Pour les joueurs, c'est un peu différent : ils ne vont pas forcément s'intéresser aux phénomènes complexes.