Evolution technique de la musique de jeu-vidéo

Fawzi Allouache
Maître des caves
Messages : 142
Inscription : 01 Avr 2011, 18:33

Evolution technique de la musique de jeu-vidéo

Messagepar Fawzi Allouache » 21 Jan 2012, 16:12

Evolution technique de la musique de jeu-vidéo
Présentation

La musique de jeu-vidéo est considérée comme un genre musical à part entière. La composition était programmée au départ, elle a ensuite pu être composée grâce à des trackers pour enfin être directement jouée par des groupes ou des symphonies. Bien que dans les débuts du jeu-vidéo, le format analogique existait déjà, il n'était pas possible de stocker les données dans les premiers programmes pour des contraintes dues à la mémoire et à l'espace nécessaire. De ce fait, la qualité sonore dépend grandement de la qualité du support. C'est de cette manière que la musique de jeu-vidéo s'est accaparée une réputation de sous-musique, à cause de ses sonorité dépouillées. Actuellement, le son 8 bits est un phénomène au Japon. Énormément de groupes utilisent ces sonorités, notamment dans la musique électronique. Des concerts en l'honneur de la musique de jeu-vidéo ont lieu, des bandes originales sont en vente et des compositeurs, directement arrivés du cinéma proposent leur service.

Les machines 8 bits

Les années 70

Au départ, la musique était composée de manière analogique (sur cassettes audio). On s'est rapidement rendu compte que ce support était très contraignant et seul l'arcade Journey dispose de cette technologie. Il était donc indispensable de trouver un moyen de stocker les données musicales différemment, directement avec le programme. C'est ainsi qu'est apparue la musique numérique. Composée directement sur des puces sonores, toutes les contraintes analogiques disparaissaient. La technologie actuelle ne permet cependant pas d'avoir de la grande qualité. En effet, les premières musiques numériques ne bénéficiaient absolument pas de polyphonies et de tonalité différentes. Elle était comparable au "BIP" du démarrage d'un ordinateur après le BIOS.

Aucun programme n'existait encore pour pouvoir composer. De ce fait, c'était les programmeurs qui composaient les musiques. On avait donc droit à des mélodies très courte lors du démarrage d'une partie par exemple ou du passage d'un niveau. Si les mélodies duraient longtemps, elles étaient très répétitives. C'est à ce moment que les programmeurs décident de reprendre certains thèmes célèbres de la musique classique, notamment de certains grands folklores. La première avancée sonore a lieu avec l'Atari 2600 qui était capable d'émettre 2 sons simultanément.

Les années 80

Avec la chute du coût technologique, les compétences sonores des puces s'améliorent de plus en plus rapidement. La seconde grande révolution est apparue avec l'arrivé de la Collecovision qui permettait de diffuser des sons sur 4 canaux différents avec 4 tonalités et un canal réservé au bruit. On pouvait donc entendre 4 sons simultanément et même bénéficier d'un semblant de percussion avec le canal réservé au bruit. La musique commence à prendre forme et les concepteurs de machines comment à y apporter une importance. On appelle cela, la synthèse FM. Le son est alors généré grâce à une sinusoïde et il est possible d’imiter grossièrement les vrais instruments. Selon la forme de notre sinusoïde, un son est produit de manière analogique. Le problème c'est qu'une sinusoïde dépend d'une fréquence. Comme la fréquence n'est pas la même dans tous les pays du monde (50hz en France et 60 Hz aux USA par exemple) le son se voyait ralenti arrivé dans nos régions.

Image

Avec l'arrivé de la Famicom, ce sont 8 tonalités jouables sur 4 canaux dont 1 pour le PCM. Le PCM permet d'enregistrer des sons analogiques sur une puce (et pas sur une cassette). C'est ainsi qu'apparaissent les 1ers sons digitalisés. Certains jeux, comme Super Mario Bros 3 utilisent ce canal pour une percussion plus réelle, d'autres comme Tortues Ninja 2 l'utilisent pour enregistrer des voix digitalisées. Alors que ces sinusoïdes sont interprétées par les supports, les PCM eux sont directement enregistrés sur les jeux. La console sert uniquement d'émetteur. Les concepteurs de machines décident donc de mettre à disposition des kits de développement, des kits de composition musicale. Même si leur utilisation reste encore complexe, il est enfin possible de concrètement composer. C'est comme cela que certains grands noms de la musique apparaitront comme Kondo, Sugiyama, Uematsu ou encore Koshiro.

Duck Tales (NES) Synthetiseur FM, on remarque bien le nombre de sons joués simultanément


L’échantillonnage et le CD

Les années 90

L'amiga est le 1er ordinateur à utiliser cette technologie. l'échantillonnage consiste à jouer des sons préenregistrées dans la mémoire (ceux de la console ou du jeu en question). Cette technique nécessite beaucoup d'espace mais la technologie actuelle permet de l'utiliser. C'est d'ailleurs pour cela que beaucoup de jeux Amiga utilisent 1 disquette, juste pour un écran titre par exemple. La qualité sonore évolue enfin et c'est alors que la musique de jeu-vidéo devient un phénomène. On lui donne alors le nom de Chiptune, en l'honneur de sa composition assistée par ordinateur. L'Atari ST ira plus loin et proposera en 1er, le port MIDI, capable de relier un instrument à lui-même pour ne plus avoir à placer les notes mais à les jouer directement. Encore aujourd'hui, l'Atari ST fait le bonheur des artistes Chiptune. L'accès reste encore cependant difficile et c'est grâce à Karsten Obarski que le premier tracker MOD apparait et permet à n'importe quel artiste de composer chez lui, une musique de A à Z en y mettant les sons qu'il désire utiliser.

Lotus 2 (Amiga) On remarque bien que ce sont des sons préenregistrés (et non des instruments).


Image

La super Nintendo utilisera une technologie similaire au PC. La puce étant capable de lire désormais des sons 16bits, il n'y a plus de sinusoïdes. la console bénéficie d'une palette d'instruments enregistrée dans sa mémoire dans une seule tonalité. Pour jouer sur des tonalité, le son est lu plus lentement ou plus rapidement ce qui donne cet aspect pas naturel. Cependant, les fichiers nécessitent une taille très réduite puisqu'il suffit uniquement à la console de lire une partition et d'y utiliser l'instrument demandés. Certains jeux super nintendo disposent de plus de 30 musiques sur une seule cartouche. Avec la possibilité d'étendre la mémoire des cartouches, certains jeux comme Tales of Phantasia proposent des pistes incroyables, comme une introduction chantée pendant 2 minutes.

Warcraft 2 MIDI (PC) Utilisation du synthétiseur intégré à Windows.


Tales of Phantasia (Snes) Utilisation du canal PCM (voix) en plus des autres canaux (instruments)

Image

L’Ère du CD

La PC_Engine est la 1ère console a utiliser le support audio pour ces jeux et ses musiques. Bien que la qualité soit au rendez-vous, le système coute cher et peu de gens en bénéficieront. Ce n'est qu'avec l'apparition de la Playstation que le support CD deviendra populaire. Contrairement à la PC-Engine, la Playstation voit ses musiques compressées. Cela permet d'ajouter des effets spéciaux aux pistes, de combattre le piratage mais aussi de permettre une exécution plus rapide des pistes. La musique peu désormais être enregistrée de différentes manière. Les compositeurs jouent directement (Philharmonie) ou utilisent des logiciels tels que Cubase qui permettent l'utilisation de VST. De rares jeux utilisent encore échantillonnage ou le MIDI (Final Fantasy pour des raisons de stockage).

Image

Ce qu'il faut retenir

Synthèse FM = Sons générés par des sinusoïdes et musiques composées par la programmation
Échantillonnage = Sons préenregistrées dans la mémoire (de la machine ou du jeu) et composé grâce aux trackers
MIDI = Instruments préenregistrés dans la mémoire de la console et jouées grâce à une partition avec une définition de l'instrument joué pour chaque note.
Canaux: Permet de jouer un son qui peut être utilisé pour la musique ou le bruitage
Canal PCM: Canal réservé aux sons préenregistrés
Canal Bruit: Canal réservé aux percussions

Voilà!

Avatar de l’utilisateur
Zim
Sauveur de princesses
Messages : 1715
Inscription : 18 Mars 2011, 23:47
Localisation : Rennes

Re: Evolution technique de la musique de jeu-vidéo

Messagepar Zim » 22 Jan 2012, 02:15

Merci beaucoup, rétrospective très instructive ! :)

Avatar de l’utilisateur
Ensis
Maître des caves
Messages : 145
Inscription : 21 Jan 2012, 20:55

Re: Evolution technique de la musique de jeu-vidéo

Messagepar Ensis » 22 Jan 2012, 13:31

Ouaip, très bonne rétrospective, merci beaucoup! Moi qui voulait me coller à un truc du genre pour mon blog... bah j'peux oublier '3'

Après, je regrette peut-être que cela ne soit qu'une rétro technique (comme son nom l'indique), et que l'on n'ai pas les conséquences artistiques basiques, comme le simple fait de se concentrer sur les mélodies. Je dis ça parce que je ne comprend pas, quand en 2012, je vois des compositeurs créer des musiques pour des jeux amateurs/indépendants sans y mettre la moindre trace de mélodie, un truc qu'on appelle parfois en caricaturant le syndrome du DJ. Je veux dire, la mélodie, c'est à mon sens essentiel, ça donne de l'identité, ça reste dans la tête (argument commercial indéniable pour le coup) et se transmet simplement en fredonnant.

http://www.youtube.com/watch?feature=pl ... UlKXZEl7n0
Pour ma défense, j'ai découvert FFII en 2004, donc il n'est pas question ici de parler de nostalgie. Pourtant, je considère ce morceau comme l'un des plus beaux de l'ère 8bit.
des compositeurs, directement arrivés du cinéma proposent leur service.
Comme Hans Zimmer ou encore le divin Oscar Araujo <3. Ça, c'est typiquement une évolution du jeu vidéo vers le cinéma, une sorte de mode bizarre qui se répand à travers tous les aspects du média, surtout dans la mise en scène (des bandes annonces dont les musiques sont composées par Two Steps From Hell, que je pense ne pas avoir besoin de présenter) et l'écriture scénaristique, où là aussi des gens de l'autre milieu déboulent. Michel Ancel serait le premier à sortir le fusil à pompe en rappelant que le cinéma n'est pas l'accomplissement du jeu vidéo, il n'y a qu'à voir l'accueil qu'à reçu le créateur d'Enslaved (chouette jeu) quand il s'est pointé vers les studios de ciné en disant "bon les gars, maintenant nous aussi on sait faire des films". Je crois qu'il a encore mal aux fesses.
On pouvait donc entendre 4 sons simultanément et même bénéficier d'un semblant de percussion avec le canal réservé au bruit.
Pour l'anecdote, les joueurs des premiers pokemon sur Gameboy se souviennent sans doute que lorsqu'on lançait une attaque, il arrivait qu'une partie de la musique se coupe, justement parce qu'il fallait libérer le canal bruitage pendant quelques secondes.

Concernant l'ère 16bit, je trouve en revanche un peu dommage d'oublier la grosse concurrente de cette époque : la Megadrive, ne serait-ce que pour aborder les différences de chipsets sonores avec les autres machines (comme la Snes) ou pour simplement voir ce qu'à apporté le MegaCD, le lecteur de CD qui se branchait sur une 16bit (Sonic Boom quoi). Moi en tout cas cela m'intrigue beaucoup.

M'enfin je chipote, le papier n'en est pas moins super et très instructif. encore bravo et merci ;)
~Xbox, Jim Carrey, steal a bear, run and pee, Xbox, Jim Carrey, steal a bear, run and pee, SEPHIROTH! SEPHIROTH!~

'3'

Avatar de l’utilisateur
Zim
Sauveur de princesses
Messages : 1715
Inscription : 18 Mars 2011, 23:47
Localisation : Rennes

Re: Evolution technique de la musique de jeu-vidéo

Messagepar Zim » 22 Jan 2012, 14:36

Pour l'anecdote, les joueurs des premiers pokemon sur Gameboy se souviennent sans doute que lorsqu'on lançait une attaque, il arrivait qu'une partie de la musique se coupe, justement parce qu'il fallait libérer le canal bruitage pendant quelques secondes.
Dans la majorité des jeux GB en fait. Quand c'est le rythme qui se barre, ça va, mais dans certains jeux, c'est la mélodie, je trouve ça assez désagréable. :(

Fawzi Allouache
Maître des caves
Messages : 142
Inscription : 01 Avr 2011, 18:33

Re: Evolution technique de la musique de jeu-vidéo

Messagepar Fawzi Allouache » 22 Jan 2012, 16:17

Après, je regrette peut-être que cela ne soit qu'une rétro technique (comme son nom l'indique), et que l'on n'ai pas les conséquences artistiques basiques, comme le simple fait de se concentrer sur les mélodies. Je dis ça parce que je ne comprend pas, quand en 2012, je vois des compositeurs créer des musiques pour des jeux amateurs/indépendants sans y mettre la moindre trace de mélodie, un truc qu'on appelle parfois en caricaturant le syndrome du DJ. Je veux dire, la mélodie, c'est à mon sens essentiel, ça donne de l'identité, ça reste dans la tête (argument commercial indéniable pour le coup) et se transmet simplement en fredonnant.
Je suis 100% d'accord. Pour ma part, la mélodie mémorisable est un élément classique de l'époque 8/16 bits (même si c'est le plus souvent présent dans les jeux japonais). Je dois faire parti des rares compositeurs de l'univers du making à préférer ce style, aux musiques d'ambiances ou partant dans tous les sens. Après je respecte tous les genres, je suis pour la diversité! :p
Comme Hans Zimmer ou encore le divin Oscar Araujo <3. Ça, c'est typiquement une évolution du jeu vidéo vers le cinéma, une sorte de mode bizarre qui se répand à travers tous les aspects du média, surtout dans la mise en scène (des bandes annonces dont les musiques sont composées par Two Steps From Hell, que je pense ne pas avoir besoin de présenter) et l'écriture scénaristique, où là aussi des gens de l'autre milieu déboulent. Michel Ancel serait le premier à sortir le fusil à pompe en rappelant que le cinéma n'est pas l'accomplissement du jeu vidéo, il n'y a qu'à voir l'accueil qu'à reçu le créateur d'Enslaved (chouette jeu) quand il s'est pointé vers les studios de ciné en disant "bon les gars, maintenant nous aussi on sait faire des films". Je crois qu'il a encore mal aux fesses.
Beaucoup de gens critiquent la génération actuelle de consoles en stipulant qu'à part une meilleure résolution, elles ne proposent rien de plus. Je pense qu'ils se trompent, la nouvelle ère a apporté le réalisme, mais surtout l'aspect cinématographique grâce à la technologie et aux nouveaux budgets injectés dans le JV par les américains et les anglais.
Concernant l'ère 16bit, je trouve en revanche un peu dommage d'oublier la grosse concurrente de cette époque : la Megadrive, ne serait-ce que pour aborder les différences de chipsets sonores avec les autres machines (comme la Snes) ou pour simplement voir ce qu'à apporté le MegaCD, le lecteur de CD qui se branchait sur une 16bit (Sonic Boom quoi). Moi en tout cas cela m'intrigue beaucoup.
La megadrive utilise la même technologie sonore que la Nes. Je ne tenais pas à parler de toutes les consoles mais seulement de celles qui ont engendrées un mouvement (Atari/Famicom/Amiga/Super Famicom/PC/Playstation).


Revenir vers « Articles »

Qui est en ligne ?

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 21 invités

cron