Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

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Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar trotter » 16 Juin 2011, 16:25

Alors ya Zim qui est venu jusqu'à oniro pour me chercher "ouaiis, trotter, Levelup se meurt si personne écrit d'article, toi tu as un super projet sur la liberté d'action en ce moment tu pourrais peut être écrire un article dessus", et comme il sait très bien flatter, j'ai pas pu résister.

Donc voici

Mes réflexions sur la notion d'action, de liberté, dans les jeux-vidéo, le point de vue de quelqu'un qui se frotte aux difficultés de la question (pourquoi la liberté dans les jeux, comment en donner l'illusion - ce n'est jamais qu'une illusion - comment concilier bonne histoire et liberté, comment structurer un jeu pour laisser place à la liberté, etc.

C'est le vieux débat entre "Raconter une histoire au joueur" et "Que le joueur invente sa propre histoire" finalement.

Raconter une histoire au joueur
Poussé à l’extrême, un "jeu" qui serait à 100% histoire, c'est tout bêtement un film ou un livre. A partir de quel moment est-ce que ça commence à devenir un jeu ?
Eh bien en fait, on peut très bien jouer avec un DVD ou un livre classique. Par exemple, en essayant de deviner la prochaine réplique du personnage avec un DVD. Essayer d'appuyer sur "PAUSE" chaque fois que quelqu'un se touche le nez à l'écran. Trouver une rime à la fin de chaque phrase.
Par contre, ni le DVD, ni le livre ne vous puniront en cas d'erreur. Vos actes n'ont aucune influence sur le déroulement du jeu. Il faut que quelqu'un (ça peut être vous), vous sanctionne, par exemple en notant vos points ou en vous forçant à boire un verre à chaque faute. C'est le maître du jeu, l'arbitre.
En jeux vidéo, on peut prendre l'exemple du freeware Osu! ou de n'importe quel jeu musical. Des images défilent à l'écran et vous devez appuyer sur les boutons au bon moments. A la fin, le jeu vous récompense avec des points.
Dans les exemples ci-dessus, l'histoire est racontée au joueur pendant que celui-ci joue. On pourrait même dire qu'il y a deux histoires parallèles : celle du DVD, et celle du joueur qui s'amuse à appuyer sur pause au bon moment. Si on joue avec ses amis, on peut rigoler à la fois aux blagues du film et à la fois aux erreurs des joueurs.

On peut mélanger ces deux histoires, par exemple avec les QTE : le jeu affiche sa petite cinématique, et vous demande soudain d'appuyer sur la touche "ENTREE". Mais, à la différence des jeux musicaux, si vous ratez, vous n'accédez pas à la suite de la cinématique, ou bien vous accédez à une cinématique différente. L'histoire du joueur influence l'histoire du jeu. Je me rappelle d'un QTE dans RE4, on voit le personnage se faire poursuivre par un gros rocher, et il faut appuyer sur plusieurs touches affichées les unes après les autres à l'écran. Qu'est-ce que j'ai fais ? J'ai esquivé un rocher ? Non. J'ai appuyé sur une combinaison de touches, comme dans un jeu musical, et le personnage sur l'écran a esquivé un rocher. Je n'ai pas réussi à esquiver le rocher, j'ai réussi la bonne combinaison de touche. Les deux histoires s'influencent, mais sont très différentes.

On peut aussi directement choisir ses embranchements sans passer par des QTE. C'est le cas, bien sûr, des livres dont vous êtes le héros mais aussi des films dont vous êtes le héros comme Deliver Me to Hell ou The Outbreak. La grosse différence par rapport à un QTE, c'est qu'il n'y a pas de règles à respecter. Dans tous les jeux cités jusqu'ici, on a un cadre précis à respecter (appuyer sur telle touche à tel moment, trouver une rime...). Dans les jeux types LDVELH, non. Le choix, on le réalise en se basant sur l'histoire, alors que pour les QTE, on pourrait très bien se passer de la cinématique qui se déroule en arrière plan et n'avoir que les boutons sur lesquels appuyer. Bref, le joueur est un peu plus immergé dans l'histoire. Mais finalement, le joueur ne fait que choisir la suite de l'histoire, il n'agit toujours pas. Le jeu est de choisir une suite qui nous plait entre des morceaux d'histoires dont on est le spectateur. En théorie, si les "morceaux d'histoire" étaient très brefs, de l'ordre d'une seconde, et les chois quasi-infinis, on aurait une liberté totale sur le déroulement de l'histoire, mais pour des raisons techniques, ce n'est pas le cas. Les "morceaux d'histoire" sont trop gros, durant ces quelques secondes le héros de l'histoire va faire quelque chose que ne ferait pas forcément le joueur (pour permettre au scénario de retrouve la trame principale). La liberté est occasionnelle (limitée à certains moments de l'histoire) et pas permanente. L'arbitre donne des libertés d'action quand ça l'arrange, et il donne les choix qui l'arrangent : autrement dit, il a un contrôle total sur le déroulement du jeu.

Les derniers jeux de Quantic Dream (Indigo Prophecy/Fahrenheit et Heavy Rain) utilisent ces deux techniques (QTE et choix type LDVELH) qui permettent de raconter une histoire dans un cadre précis tout en faisant participer le joueur de loin et de temps en temps. Mais à la différence des LDVELH ou des films interactif, Heavy Rain propose aussi des phases où le joueur peut déplacer un personnage en temps réel. C'est une différence importante : au lieu d'avoir un maître du jeu qui indique "il est possible d'aller à droite" à certains moments, on peut aller à droite à n'importe quel moment. Et donc ?
Et donc l'histoire du joueur vient parasiter l'histoire du jeu. Alors que l'arbitre ne proposait que des choix en accord avec l'histoire du jeu, le joueur désormais libre de faire quand il veut ce qu'il veut, ne suit pas nécessairement la trame narrative.

Un petit exemple :
"Vendredi soir, 23 h. Véronica tourne et se retourne dans son lit étouffant. Elle décide de se lever pour aller boire de l'eau fraiche. Elle avance droit vers le mur, puis fait un demi-tour sur elle même, puis un tour rapide de l'autre coté. Elle s'avance vers le lit puis reste plantée devant. Elle se retourne. Elle se retourne une deuxième fois. Puis se retourne encore et avance d'un pas zigzaguant vers la sortie de la pièce. Elle reste planté quelques minutes là, les bras ballants. Soudain, elle se met à courir, droit dans un mur, où elle va se cogner avec une petite plainte. Elle se tourne lentement et se dirige vers la cuisine. Sans cesser de marcher, la voilà devant le frigo. Elle attend, sans cesser de marcher sur place. Se décale un peu pour être pile en face du frigo. Véronica ouvre alors le frigo, s'empare de la bouteille fraiche et boit avec plaisir. Elle la repose, puis ferme le frigo. Veronica fait un demi tour sur elle même et va vers les placards. Elle reste devant quelques instants, puis fait de même devant les plaques électriques. Elle se dirige alors en courant vers la télévision. "Je n'ai pas envie de regarder la télé.", s'exclame-t-elle en remuant la tête, "Je vais retourner me coucher." Veronica s'en va alors, toujours en courant, vers la chaine Hi-fi, y reste quelques instants. Elle semble soudain être décidée : d'un pas pressé, elle se rend à la porte d'entrée."Je n'ai pas envie de sortir.", s'exclame-t-elle en remuant la tête, "Je vais retourner me coucher."
Vous voyez ce que je veux dire par "parasiter l'histoire du jeu" ? Le joueur veut explorer. Mais Véronica veut dormir. Les deux histoires s'opposent. Ca donne un mélange bâtard. On y est habitué, mais il faut avouer que c'est complètement ridicule.

On voit très bien dans cet exemple que le joueur ne vit pas la même chose que Véronica. Certes, le joueur est beaucoup plus libre que dans un LDVELH ou un QTE, mais les deux histoires ne sont pas les mêmes : le joueur se déplace en cherchant les interactions alors que Veronica voulait boire un coup et dormir.
Exactement la même chose dans le jeu Caves de Valv et bon nombres de RPG : l'histoire, mais parfois l'univers du joueur et du maître du jeu sont décalés. Par exemple le joueur passe son temps à ressusciter ses morts, mais si le maître du jeu décide qu'un PNJ doit mourir pour le bien du scénario, il meurt. Le joueur fait des quêtes ridicules comme chercher un chat pour avoir un petit bonus alors que le personnage doit sauver le monde.

Alors quoi ? Comment répondre à cette question paradoxale : "Comment raconter une histoire au joueur tout en lui laissant l'impression de la diriger ?"
Soit on est condamné à limiter drastiquement les choix et l'influence du joueur, soit on accepte de raconter un scénario parasité par des phases où le personnage se met à agir de façon totalement illogique ?

Non. Il est possible à la fois de raconter une histoire, et de s'assurer que le joueur agisse de façon tout à fait rationnelle sans le brider dans sa liberté d'action.

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar trotter » 16 Juin 2011, 16:30

Enfin vous voyez le plan, je vais passer par les FPS type Half Life, puis Far Cry, puis les simulations de vie, puis les 100% bac à sable genre minecraft comme ça on aura tout un spectttre de jeu avec soi disant de moins en moins de scénario mais que NENNI. Puis les différences entre les scripts et les ennemis placés à l'avance, s'affranchir des limites en utilisant les outils qu'on nous a donné, et puis les jeux d'arcades.

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar Zim » 16 Juin 2011, 18:10

"ouaiis, trotter, Levelup se meurt si personne écrit d'article, toi tu as un super projet sur la liberté d'action en ce moment tu pourrais peut être écrire un article dessus"
xD
Et c'est faux, d'abord, pour que Level Up! se meure, il faudrait déjà qu'il ait commencé à vivre vraiment. :poulpe:

Je m'attendais à ce qu'on redéfinisse le sujet par mp, mais soit, on peut s'amuser ici à faire un article dont vous êtes le héros. :nerd:

On peut explorer ma question dans trois directions au moins :
- l'opposition entre raconter une histoire au joueur et permettre au joueur d'écrire son histoire (dans le cadre défini par le jeu)
- liberté en tant que toute-puissance qui ruinent le challenge (les god modes des vieux FPS), ou liberté de s'imposer des contraintes trop dures (ex. faire une équipe de mages blancs dans Final Fantasy 1).
=> la liberté par rapport à l'histoire, et par rapport aux règles du jeu : quel risque à accorder une trop grande liberté.
- enfin, et c'est là le cœur du sujet, parce que c'est le cœur de ton jeu : donner au joueur la sensation de liberté. Cet aspect du sujet recoupe les deux autres (on peut y voir, sinon un aboutissement, la forme de jeu qui amène le plus précisément à repenser ces notions : trop de liberté tue le plaisir).

Note que la liberté n'a pas nécessairement trait à l'histoire : certes, tout est potentiellement racontable, mais il ne faut pas oublier la notion de "tellable moments" dont j'avais déjà parlé ailleurs : dans Tetris, on peut décrire de manière très détaillée le déroulement de "l'aventure", mais ce qui est digne d'intérêt, c'est plutôt de finir le jeu, d'obtenir tel score, avec tel handicap.

A ce propos, ton exemple illustrant comment les actions du joueur peuvent parasiter l'histoire m'a bien fait rire, et m'a rappelé cette page de bd : http://www.bouletcorp.com/blog/index.php?date=20100903
C'est une affaire de point de vue : du point de vue du joueur, le parasitage n'est pas perceptible, car il correspond à l'histoire qu'il vit ("je joue à un jeu, j'explore, je découvre les commandes"), de même que la première version de l'histoire dans la bd fait sens, parce qu'elle est restituée du point de vue du personnage qui la vit.

Je te livre enfin un petit bout de réflexion issu d'un échange avec mon frère, à propos des QTE : j'affirmais que les QTE étaient relevaient d'un défaut de conception, quand ils servent à rendre interactif une séquence qui ne peut pas être produite par les actions primaires du personnages (actions répétables à volonté : tirer, frapper, ou discuter, décrire dans le cas d'un point and click) : c'est que sans doute les développeurs abordent la question du la création d'un jeu du mauvais point de vue, voulant forcer une histoire dans un jeu, quitte à mettre des phases de QTE pour rappeler que c'est un jeu.
Lui soutenait au contraire que les QTE, bien utilisés, permettaient de mettre en valeur une scène hautement dramatique, et d'offrir une très jolie séquence au joueur pour le plaisir des yeux et des oreilles : alors que si l'on se contente de faire jouer les verbes primaires du joueur, on arrive à des absurdités, et il citait pour cela GoldenEye sur N64 (opposé à Golden Eye sur Wii, qui contient des QTE), où les combats contre les bosses consistaient à vider chargeur sur chargeur dans le visage de l'adversaire : ce qui certes est amusant, du point de vue du gameplay, vider chargeur sur chargeur, c'est ce qu'on attend d'un combat contre un boss, mais ça finit aussi par être absurde. Cela dit, du point de vue du joueur à fond dans le jeu, ce n'est pas si grave : cf. ton exemple et le mien avec la bd.
Intéressant également, il reconnaissait que les QTE gâchaient parfois les cinématiques, nous empêchent de les apprécier en nous mettant dans un état de tension, nous obligeant à les revoir encore et encore si on ratait : il préfère de loin les QTE à la LDVELH : louper une séquence en amène une autre, mais pas forcément la défaite, qui elle ne se produit que dans les situations critiques (l'ennemi vise la gorge alors que tu es au sol, tu loupes ton dégagement, que tu ne meures pas deviendrait aussi absurde que vider des chargeurs entiers dans la tête du boss).

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar trotter » 16 Juin 2011, 18:25

Je te rejoins pour les QTE. J'ajoute que les QTE à la LDVELH, je pense que ça n'a rien à voir. On me demande d'appuyer sur A plein de fois. Si je rate, je tombe, et le niveau se poursuit dans les égouts. Si je réussi, j'arrive à sauter au dessus du vide et le niveau se poursuit en hauteur. Bon. Mais dans les deux cas, je n'aurais pas pris l'une ou l'autre décision. J'ai juste essayé de faire ce qu'on attendait de moi, c'est à dire appuyer sur un bouton le plus vite possible, ça n'a aucun rapport avec l'histoire.

Je préfère largement une approche LDVELH, plus posée et surtout qui demande de s'investir par rapport à l'histoire : la question "Voulez-vous passer par les égouts ou les toits ?" demande une reflexion, que m'avaient dit les PNJ, quel chemin semble être le plus sage, etc.

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar Zim » 16 Juin 2011, 19:00

Oui, c'est vrai, ce ne sont pas vraiment des QTE à la LDVELH, puisque le joueur ne décide rien. En plus c'est moi qui ai appelé ça comme ça ; sa remarque ne concernait pas la liberté d'action, mais la liberté d'échouer dans son action : il n'aime les QTE ni trop punitives, ni celles qui sont artificiellement permissives (ex. tu rates une action, ça t'enlève un point, et la scène se déroule normalement - donc ton échec n'a eu aucune conséquence sur l'action - et tu perds quand tu n'as plus de points). ^^

Je lui avais fait une autre remarque concernant la narration (la discussion était parti du trailer du dernier Tomb Raider, pour se poursuivre sur le fantasme de confondre jeu-vidéo et cinéma). Je lui disais que toute histoire traditionnelle peut s'adapter fidèlement aussi bien en livre qu'en film, qu'en bd, en théâtre (avec renforts d'effets spéciaux si besoin), même si on perd au passage le style de l’œuvre originale, qu'on doit créer un nouveau style adapté au nouveau média.
Mais adapter une histoire en jeu-vidéo, ça change tout, du moment qu'on donne un rôle au joueur, il faut accepter qu'il puisse... ne pas le jouer.
Il avait renchéri en évoquant une scène du Seigneur des Anneaux : les Nazghuls attaquent en pleine nuit la compagnie (Aragorn et les Hobbits). Aragorn en quelques secondes réagit, et dans une séquence hallucinante où la moindre erreur aurait été fatale, réussit à faire battre en retraite les Nazghuls. La scène sert à montrer à la fois combien les Nazghuls sont dangereux (leur laisser quelques secondes de liberté leur aurait permis d'arriver à leur fin), et que, dixit mon frère, "Aragorn, c'est pas un pd" (la scène se passe dans le premier Livre, et définit brillamment le personnage aux yeux du lecteur/spectateur. Bref, cette scène, il y a joué dans une adaptation en jeu-vidéo : et au lieu de durer 30 secondes, elle dure plusieurs minutes, et se transforme en une sorte de tower defense, qui n'est pas tout à fait ennuyeux, mais ne perd son sens : les Nazghuls ne sont pas si dangereux, et Aragorn pas si redoutable non plus finalement. Pourtant il fallait bien donner son importance à la séquence, et à défaut d'exiger des réflexes surhumains de la part du joueur, elle a été diluée dans le temps.
La scène aurait pu être adaptée en QTE, mais à ce rythme-là, si on veut préserver la richesse et l'efficacité de l'histoire, le jeu entier serait en QTE... Qui sont trop pauvres et dirigistes (le joueur n'agit pas, puisque l'appui sur les touches aboutit à des actions qu'il ne décide pas : il appuie sur un bouton parce que ça lui est demandé, sans qu'il puisse en deviner précisément les conséquences).

=> Raconter une histoire en livre ou en film, c'est raconter d'une manière différente ; et raconter une histoire en livre ou en jeu, c'est raconter une autre histoire.

D'où l'importance à mes yeux d'écrire une histoire qui découle du gameplay plutôt que l'inverse : une histoire beaucoup plus lâche, s'en tenant à un fil directeur et laissant la part à l'interprétation personnelle et à l'improvisation - le parallèle avec le théâtre mériterait d'être développé.
(Dastrem s'y connaît bien mieux que moi dans cette forme de narration. :) )

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar trotter » 16 Juin 2011, 19:13

Il est possible d'avoir l'intérêt du personnage jouable et l'intérêt du joueur qui se rejoignent. Si Veronica atterrissait dans un lieu inconnu, il n'y aurait rien d'illogique à ce qu'elle tourne en rond, essaie de sortir et examine chaque objet.
Prenons Half Life : le personnage doit survivre et retrouver le chemin de la surface. Ca rejoint un but classique du joueur, qui est de tuer et d'avancer dans le scénario. Certains joueur peuvent préférer dessiner des bites avec les impacts de balles, mais est-ce si nuisible au scénario ? Si le personnage principal était présenté comme un personnage froid et sérieux, ça serait effectivement du parasitage de scénario, mais en l’occurrence, il est totalement effacé, il ne parle pas, pour que le joueur puisse mieux s'identifier mentalement. Si le joueur se met à faire n'importe quoi, ça peut très bien être le personnage principal qui pète un plomb.
Bref, avoir à peu près le même but que le personnage principal, c'est à dire ne pas avoir envie de faire autre chose m'a donné une immense impression de liberté. J'essayais à chaque fois d'aller vers le haut, et si le niveau ne me le permettait pas, j'étais frustré, exactement comme le personnage principal l'aurait été. Je n'étais pas frustré parce que le level design ne me permettait pas d'aller en haut, mais parce que le plafond s'était effondré, parce qu'une explosion me renvoyait tout en bas, ou parce que je me faisais téléporter. Mais à chaque fois, j'arrivais à ruser, à trouver un passage, une conduite d'aération. J'étais enfermé, mais c'était normal, pas du tout artificiel.
Cette impression de liberté s'arrêtait bizarrement précisément quand je sortais de la base. Ca y est ! L'exterieur enfin ! Mais à chaque fois, une raison qui se justifiait pour le personnage, mais pas pour moi, me forçait à retourner à l'intérieur.

Exactement la même sensation avec Portal : le personnage est effacé, lui et le joueur on intérêt à résoudre des puzzles tordus pour s'enfuir. Quand on parviens à s'enfuir pour de bon, à passer derrière le décor, c'est l'extase, et pour le personnage, et pour le joueur qui n'attend que ça.

En gros, le maître du jeu dit au joueurs : "Tu fais ce que tu veux, sache simplement que tu es enfermé." Et le joueur cherche à trouver la faille, et on en a mis une. L'ordinateur tueur de Portal dit plusieurs fois "Le prochain niveau est impossible à réussir.", la satisfaction et la sensation de liberté qu'on retire lorsqu'on y arrive est multipliée.

En d'autres termes :
-limiter en apparence la liberté du joueur pour qu'il se sente encore plus libre une fois qu'il a brisé ces chaines.
-pour que les deux histoires concordent, avoir un personnage mentalement neutre qui cherche lui aussi à les briser, renforçant l'immersion dans le jeu.

Plus généralement, arriver à ce que le personnage joueur et le joueur aient les mêmes but.

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar trotter » 16 Juin 2011, 19:23

Mais adapter une histoire en jeu-vidéo, ça change tout, du moment qu'on donne un rôle au joueur, il faut accepter qu'il puisse... ne pas le jouer.
Oui, tout à fait. La plus grosse différence c'est qu'on perd le contrôle du personnage principal, mais et alors ? En tant que MJ, il nous reste le contrôle de tous les PNJ et du destin.
Pour la séquence d'Aragorn je vois pas trop le problème, il suffit de faire un personnage très puissant qui latte les Nazguls et puis voilà non ? Ou on nous file le contrôle d'un hobbit qui se fait défoncer puis d'Aragorn. Enfin moi cette scène je l'ai vu comme étant une démonstration de la nullité Nazgul donc bon...

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar Zim » 16 Juin 2011, 20:06

Pour la séquence d'Aragorn je vois pas trop le problème, il suffit de faire un personnage très puissant qui latte les Nazguls et puis voilà non ? Ou on nous file le contrôle d'un hobbit qui se fait défoncer puis d'Aragorn. Enfin moi cette scène je l'ai vu comme étant une démonstration de la nullité Nazgul donc bon...
Perso, j'ai lu le bouquin en 1997, le film à sa sortie, mes souvenirs sont vagues. :p Mais d'après mon frère, la scène montrait à la fois la puissance des Nazguls et d'Aragorn : à la moindre erreur Aragorn aurait pu mourir, et il a fourni à ce moment-là un effort héroïque, tenant autant à ses capacités que du contexte (s'improviser une torche) que de la chance. Du coup, faire des Nazguls nuls, ça valorise moins Aragorn, et un hobbit qui se fait chopper, ce serait la mort directe, donc grosse infidélité à l'histoire.
-limiter en apparence la liberté du joueur pour qu'il se sente encore plus libre une fois qu'il a brisé ces chaines.
-pour que les deux histoires concordent, avoir un personnage mentalement neutre qui cherche lui aussi à les briser, renforçant l'immersion dans le jeu.
Je suis d'accord. Tu montres là quelques différences fondamentales avec la construction des histoires classiques : l'effacement de la personnalité du protagoniste. Qu'on retrouve dans beaucoup de jeux, que ce soit Mario, Zelda, Dragon Quest, Metroid, Suikoden (des persos lambda ou muets) pour des persos à l'apparence spécifique, ou encore les Elder Scroll, les Baldur's Gate et co. (où l'on customise les personnages, et la liberté d'action est encore plus grande).

Une des richesses du jeu-vidéo, c'est de proposer au joueur de se découvrir à soi-même par son comportement dans des situations nouvelles. Et c'est comme tu dis le meilleur moyen de résoudre la contradiction entre histoire et liberté d'action : tandis que plus le personnage est défini psychologiquement, plus le risque est grand qu'une contradiction apparaisse entre nos actions et son caractère, ou ses actions (en cut-scene) et notre caractère.

Cela dit, un des charmes du jeu de rôle papier est d'incarner un personnage au caractère différent du nôtre. Mais je m'intéresse peu au JDR, non plus qu'au théâtre (en tant qu'acteur je veux dire) : je comprends assez mal ce qui se passe à ce moment-là, et les positions varient d'ailleurs, entre ceux qui prônent l'expression de notre propre personnalité dans chaque nouveau rôle, d'autres son effacement total par le bien d'une identification interne totale (devenir autrui), ou bien seulement externe (simple imitation).
Ici Gaetz est demandé pour apporter son témoignage. :nerd:

=> pour le personnage principal, une personnalité peu marquée pour que nos actions n'entrent pas en contradiction avec, ou bien une personnalité marquée que l'on essaie d'illustrer par nos actions ?

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar trotter » 16 Juin 2011, 22:17

Je sais plus quel jeu c'était, Divine Divinity peut être ou Planetscape, on avait une liste de choix de réponses toutes opposées. Et à chaque fois, le personnage allait dans le sens du joueur à postériori.

"Voulez-vous m'aider ?
-Oui = Bien sûr, quelle question ! Il faudrait être fou pour vous refuser mon aide, on a tous à y gagner dans cette histoire.
-Non = Ma réponse ne va certainement pas vous surprendre : c'est non. J'ai d'autres chats à fouetter."

Ca parait un peu concon mais même en répondant de la merde au hasard on avait l'impression d'être cohérent et réfléchit vu que le personnage donnait tous les arguments derrière (en plus il rappelait un peu les enjeux du truc) et de toujours répondre ce qu'il fallait.

Sinon ça m'étonne que tu t'intéresses si peu au jeu de rôle. Moi ça me fascine justement par la liberté extraordinaire qu'il offre mais j'y ai jamais vraiment joué. J'espère qu'on pourra faire ça à l'IRL avec un oniromancien qui s'y connait un peu.

Pour le théâtre j'ai ma maman qui vit de ça et c'est peut être pour ça que j'ai longtemps eu l'impression que les gens jouaient des rôles en permanence dans la vie selon l'interlocuteur et la situation. J'ai longtemps cru que les gens faisaient semblant de crier dans les montagnes russes, par exemple. Ou qu'un médecin faisait exprès de prendre un air sérieux parce que c'est comme ça qu'il doit être. Certaines personnes ont une façon de plier les sourcils ou de faire passer de l'air entre leurs dents en réfléchissant, ou alors une démarche particulière, je pensais que c'était pour se donner un style. Donc sur scène quand je jouais je changeais pas grand chose à la vie courante, juste un autre masque à base de vérités simplistes genre "dans cette situation, on doit faire ça". Ca n'empêche pas d'y mettre du coeur voire de se laisser bouffer par la personnalité qu'on a créé (par sur scène mais dans la vie, si on est persuadé qu'on devrait se sentir de telle façon s'il arrive telle chose par exemple).

Pour le créateur ya un travail d'interprétation à faire pour les PNJ complexes en tout cas. Certains makers testent des choses directement sur les gens "pour voir leur réaction", c'est pas sympa...

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar Zim » 17 Juin 2011, 12:24

Sinon ça m'étonne que tu t'intéresses si peu au jeu de rôle.
Je m'y intéresse, mais de loin : je suis trop mauvais acteur. :awi:
Je m'étonne justement que tu n'y joues pas plus alors que tu as l'expérience du théâtre, et la culture geek qu'il faut. :nerd:

Pour en revenir à l'article, le sujet en est vaste. Pour le réduire, je verrais une présentation de ton travail : expliquer comment tu es es venu à travailler sur la liberté dans les jeux-vidéo, par ton expérience de joueur, ce que tu as voulu créer ou recréer, les possibilités qui se sont offertes, celles que tu as choisies, pourquoi, etc. Un article un peu making-of, qui fasse en même temps réfléchir sur l'importance de cette notion dans les jeux, et qui donne quelques clés au lecteur qui est aussi un développeur : idéalement, ces articles ont tous une application pratique évidente, je préférerais qu'on évite les travaux de type un peu universitaire. :)

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar trotter » 17 Juin 2011, 14:54

Je m'étonne justement que tu n'y joues pas plus alors que tu as l'expérience du théâtre, et la culture geek qu'il faut. :nerd:
Pas assez de potes intéressés dans mon entourage (campagne paumée, tout ça).

Si tu veux je ferais un making off mais ça m'a toujours semblé un peu branlette surtout que le jeu est pas sorti, interview-moi sinon o/.
Dans le thread sur oniro je détaille la technique et les choix de gameplay (surtout parce que j'ai une mauvaise mémoire et que j'oublie très vite ce que je voulais faire) :
http://www.rpg-maker.fr/index.php?page= ... 2242&deb=1

Dernièrement le gros apport ça a été l'agriculture ça a été détaillé d'un point de vue technique et économique sur le thread. En ce moment je suis en train de faire en sorte qu'on puisse se déplacer accroupi à vitesse "très lente". J'avais envie de pouvoir piéger les donjons avec des bonnes vieilles dalles piégées et des coffres explosifs, mais il fallait un moyen de les désactiver. Si on se déplace accroupi en vitesse "très lente", c'est chiant mais on peut désactiver les pièges si on a une dextérité assez élevée.
Image

Ce que je veux, c'est que si joueur tombe dans un piège, il ne soit pas en colère contre le jeu, mais qu'il s'en veuille de pas avoir été assez prudent : D
Le prochain gros ajout ça sera les alliés, qui ne suivront pas bêtement le joueur mais pourront lui dégager un passage dans les donjons, désactiver les pièges justement, bref, un truc très scripté qui donne l'impression de jouer avec un deuxième joueur humain, au niveau technique c'est un beau défi...

Ya Loly74 qui a un projet un peu similaire au mien, monde ouvert/simulation de vie je sais pas si tu as vu :
http://www.rpg-maker.fr/index.php?page=forum&id=18226
Elle a des vidéos où elle détaille son gameplay.

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar trotter » 17 Juin 2011, 15:18

Et les donjons seront très fortement inspiré de ça :
Spoiler:
 

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar trotter » 18 Juin 2011, 17:20

En fait tu sais quoi, c'est pas que ça fait branlette, c'est que j'ai réfléchi aux questions de liberté d'action et surtout conséquences quand j'y étais confronté, maintenant je réfléchis à d'autres questions de gameplay.

C'est pas une reflexion dans le vide pour le plaisir, mais pour résoudre un problème pratique.

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar Zim » 18 Juin 2011, 18:27

Liberté d'action maximum

Je veux qu'on puisse insulter, voler, tuer chaque PNJ.
...mais aussi dans l'autre sens, leur dire des choses positives, les aider, voire commencer une relation amicale ou amoureuse.
En pratique, chaque PNJ a au minimum les fonctions "discuter/insulter/complimenter".

Conséquences de nos actions

Pour me sentir dans un monde vivant, j'ai besoin que celui-ci réagisse à mes actions.
Dans le jeu, il y a donc un système de réputation.

Une réputation vis à vis de :

- chaque PNJ
- d'un groupe (par exemple, un village)
- des dieux (globale).

Insulter un membre d'un village fera baisser notre relation avec ce membre.
Il ira dire du mal de vous aux autres villageois.
De ce fait, les autres villageois vous regarderont d'un sale œil, sauf ceux avec qui vous avez une très bonne relation, qui ne prêteront pas trop attention aux rumeurs.
J'aimerais lire un développement de cette partie : pourquoi tu as été amené à mener ce projet, en quoi il consiste (les objectifs visés, sachant qu'il s'appelle "Projet sur la liberté et ses conséquences"), ce qui marche, ce qui ne marche pas, comment il est mené de manière à permettre cette liberté et en faire voir les conséquences...

Tout ça pour réfléchir à la place de la liberté dans le jeu-vidéo, en prenant en exemple ce que tu fais, mais pas tant pour expliquer ce que tu fais (le fonctionnement de l'agriculture) que pour faire réfléchir d'autres développeurs sur la question (qui est cruciale dans tous les jeux, même si toi tu la traites explicitement : et parce que tu la traites explicitement, ta démarche en est d'autant plus exemplaire).

La question que toi tu peux te poser est : qu'est-ce que je peux apporter à d'autres développeurs sur la question de la liberté dans un jeu-vidéo (par rapport au gameplay, au récit). Ce n'est pas de la branlette, c'est partager ton expérience.

Le projet de la fille a l'air tout à fait prometteur !

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar trotter » 18 Juin 2011, 18:53

J'aimerais lire un développement de cette partie : pourquoi tu as été amené à mener ce projet, en quoi il consiste (les objectifs visés, sachant qu'il s'appelle "Projet sur la liberté et ses conséquences")
Ah, ok.
Je pense que la plupart des médias de fiction donnent des mauvaises bases aux enfants.

Par exemple, quand tu allumes la TV le samedi matin pour les émissions jeunesses, tu vois des gentils frapper des méchants. J'ai mon cousin de 9 ans qui s'est battu avec un de ses camarades, mais il estime avoir le droit parce que l'autre élève "a été méchant avec lui".

C'est aberrant. Je te parle même pas des RPG où on tue des milliers de méchants soldats sans aucune conséquence "parce que nous on est les gentils".

Bref, c'est un jeu un peu moralisateur. J'ai besoin qu'on puisse se sentir libre de tuer/voler qui on a envie pour faire passer le message et il faut que les PNJ soient riches, avec beaucoup de choses à apporter au joueur.
Plutôt que de dire "c'est pas bien d'utiliser la violence, tout le monde à quelque chose à vous apporter", j'utilise l'aspect interactif "allez-y, insultez et tuez tout le monde si vous voulez" pour qu'ils en tirent eux mêmes les leçons. Ca veut pas dire non plus que si on joue méchant on finira forcément en prison, j'essaie d'être plus subtil que ça.

Ya d'autres petits choses comme ça, genre les relations de couples. Si on se met en couple avec les personnages du premier village, comme certaines personnes qui essaient de se mettre en couple le plus vite possible avec n'importe qui, on va vivre un enfer parce que ce sont des égoistes et qu'on aurait dû attendre de trouver des gens qui nous correspondent mieux.
ce qui marche, ce qui ne marche pas
C'est encore en phase de test donc c'est un peu tôt pour parler de ça, les joueurs testent, ils ne s'investissent pas.
comment il est mené de manière à permettre cette liberté et en faire voir les conséquences...
Euh, techniquement ?
Tout ça pour réfléchir à la place de la liberté dans le jeu-vidéo, en prenant en exemple ce que tu fais, mais pas tant pour expliquer ce que tu fais (le fonctionnement de l'agriculture) que pour faire réfléchir d'autres développeurs sur la question. La question que toi tu peux te poser est : qu'est-ce que je peux apporter à d'autres développeurs sur la question de la liberté dans un jeu-vidéo (par rapport au gameplay, au récit). Ce n'est pas de la branlette, c'est partager ton expérience.
Bah honnêtement je crois pas révolutionner grand chose. Les quêtes se lancent si on a telle réputation par rapport au personnage, comme dans n'importe quel CRPG. Ya aussi les besoins basiques du personnage le forcent à jouer pour trouver des solutions. Par exemple, on est paumé dans la forêt, on voit une petite maison, elle est fermée. On peut dormir devant pour attendre ses occupants ou on peut forcer la serrure pour voler au risque de se faire choper, bref, des histoires naissent toutes seuls de ces contraintes et de ces libertés, mais c'est aussi le cas (en plus évolué) dans n'importe quel roguelike ou des jeux genre Robinson's Requiem.

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar AristA » 18 Juin 2011, 21:55

J'ai lu et c'était très intéressant, continue à développer comme le dit Zim, les articles sur le sujet sont assez rares et pourtant intéressants à lire. :]

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar trotter » 19 Juin 2011, 10:26

Ah bon, comme quoi.
Je continue un peu alors.

Dans Half life, il y a néanmoins quelque chose d'utilisé qui est souvent synonyme de restriction de liberté : les scripts. Ce sont des petits moments scénarisés déclenchés par une action du joueur. Par exemple, si le joueur ramasse un bonus, des ennemis apparaissent dans son dos, ou si le joueur franchi un point précis, des hélicoptères arrivent et des ennemis en descendent en rappel. En fait, le jeu suit et s'adapte à la progression du joueur afin d'être sûr qu'il ne passera à côté d'aucun des moments forts et lui proposer une histoire plus intense.
D'autres jeux choisissent une approche totalement opposée, comme Thief, Far Cry ou Hitman : les ennemis sont déjà présents avant que le joueur arrive. La différence est immense car cette fois-ci, au lieu de lui imposer une scène, on offre plusieurs choix dans la façon d'approcher les ennemis. Ce n'est plus le maître du jeu qui décide du rythme et de la façon dont se déroule la scène : il laisse une grande partie de ses pouvoirs au joueur. Cette approche beaucoup plus interactive est plus exigeante pour les developpeurs. D'une part, bien évidemment, les ennemis doivent en effet avoir l'intelligence de pouvoir réagir aux diverses attaques possibles du joueur. D'autre part, les niveau doivent être plus complexe pour permettre d'aborder l'action selon divers angles.
En utilisant cette façon de faire, il est néanmoins tout à fait possible de mettre en place, si peut être pas un scénario, au moins une ambiance, de raconter quelque chose, comme le fait très bien No One Lives Forever. Les ennemis, placés à l'avance ne restent pas stupidement immobile, ils patrouillent et surtout discutent entre eux, nous immergeant dans leur monde. Le maitre du jeu laisse le joueur écrire sa propre histoire dans le monde qu'il lui offre, avec tout de même les ennemis placés à l'avance dans les niveaux afin d'être sûr que le joueur ait une histoire intéressante à créer.

On pourrait tout de même aller encore plus loin et imaginer que les ennemis ne soient pas du tout placés par le maitre du jeu, qu'ils vivent leur propre vie en se battant, cherchant à manger, dormant, etc. Les possibilités offertes au joueurs sont encore multipliées (au lieu d'attendre "simplement" qu'un garde s'éloigne pour passer on peut attendre qu'il dorme, on peut créer une diversion, mettre en place des pièges plus complexes...) et on est un peu plus immergé dans l'univers qui est moins centré sur le joueur. C'est ce que qu'aurait dû faire STALKER, malheureusement c'est un défi technique de taille demandant une sofistication de l'intelligence artificielle encore inaccessible. A la place, STALKER utilise des scripts qui ne sont pas centrés sur le joueur : en arrivant dans une zone, on peut par exemple voir plusieurs personnage en racketter un autre. On est alors libre d'intervenir (pour un camp, pour l'autre, ou le sien, tout dépend sur qui on tire !) ou de se planquer derrière une voiture. Par contre, aucun affrontement contre le joueur n'est scripté, seulement les choses qui arrivent entre PNJ.
Je trouve que c'est le meilleur des deux mondes.

C'est une autre façon de raconter l'histoire du jeu, une façon qui ne va pas contre l'histoire du joueur. Au lieu d'imposer sa narration, elle est diffusée à petites gouttes un peu partout. Pour comparer, ce serait un peu comme lire le seigneur des anneaux en utilisant un dictionnaire des noms propres. Pourquoi pas ? Bien sûr on perd beaucoup de procédés narratifs (difficile de mettre du suspense, par exemple), ce qui n'empêche pas l'intrigue d'être accessible.

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar Zim » 19 Juin 2011, 19:59

Pour comparer, ce serait un peu comme lire le seigneur des anneaux en utilisant un dictionnaire des noms propres.
Pas tout à fait. l'expérience a été tentée avec Golden Sun sur DS. C'est un univers complexe, ça se voit que les développeurs aiment leur background, enrichi au fil des épisodes, mais tellement gros qu'ils ne pourraient pas l'imposer aux joueurs. Ils ont donc recourt à des liens hyper-textes dans les dialogues : tout mot présent dans le dictionnaire est mis en évidence (d'une couleur différente selon que l'entrée a déjà été consultée ou non. Libre au joueur de se renseigner sur les détails ou non.
Personnellement, leur background, j'en avais rien à fiche, mais on a toujours le besoin compulsif de faire tout ce qu'il y a à faire : donc je cliquais sur les mots, et lisais à peine les explications. Mais ça suffisait à ralentir encore plus le flux narratif, qui déjà s'embourbait dans des bavardages incessants. Bref, lire des annotations est vraiment pénibles. je ne le fais jamais non plus quand je fais un livre, au point que je préfère prendre des éditions sans annotations pour ne pas être tenté : parce que ça rompt le rythme, et que le plus souvent, ça n'apporte rien.
On pourrait tout de même aller encore plus loin et imaginer que les ennemis ne soient pas du tout placés par le maitre du jeu, qu'ils vivent leur propre vie en se battant, cherchant à manger, dormant, etc.
Magnolia pousserait les hauts-cris. :fufu: Mais c'est qu'en tant que level-designeuse, elle est fondamentalement contre l'aléatoire dans un parcours, elle conçoit plutôt le placement des ennemis comme le placement de notes sur une partition (enfin la métaphore musicale est de moins, mais bon :nerd:) : parmi tous les possibles, trouver la meilleure composition pour provoquer tel effet à tel moment, à la suite d'un certain autre, en en précédant un autre.

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar trotter » 19 Juin 2011, 20:48

Pas tout à fait. l'expérience a été tentée avec Golden Sun sur DS. C'est un univers complexe, ça se voit que les développeurs aiment leur background, enrichi au fil des épisodes, mais tellement gros qu'ils ne pourraient pas l'imposer aux joueurs. Ils ont donc recourt à des liens hyper-textes dans les dialogues : tout mot présent dans le dictionnaire est mis en évidence (d'une couleur différente selon que l'entrée a déjà été consultée ou non. Libre au joueur de se renseigner sur les détails ou non.
Personnellement, leur background, j'en avais rien à fiche, mais on a toujours le besoin compulsif de faire tout ce qu'il y a à faire : donc je cliquais sur les mots, et lisais à peine les explications. Mais ça suffisait à ralentir encore plus le flux narratif, qui déjà s'embourbait dans des bavardages incessants. Bref, lire des annotations est vraiment pénibles. je ne le fais jamais non plus quand je fais un livre, au point que je préfère prendre des éditions sans annotations pour ne pas être tenté : parce que ça rompt le rythme, et que le plus souvent, ça n'apporte rien.
La comparaison est peut être maladroite, évidemment on ne lirait pas le livre d'une traite mais les éléments seraient diffusés petits à petits. En écoutant les conversations des PNJ, en lisant des lettres, en regardant des petites scénettes extérieures au joueur. Bioshock utilise tout ça et la qualité de sa narration est souvent saluée (même si je comprends pas trop, c'est utilisé tout aussi bien dans Deus Ex).

Il adore :
http://www.gameblog.fr/article-lecteur_ ... ve-dans-bi

Il est un peu plus critique :
http://www.ubikuity.fr/articles/jeu-vid ... shock.html

Il ne parle pas trop de la narration mais soulève beaucoup d'erreurs de game design (ils ont une finesse d'analyse impressionante sur ce site) :
http://www.nofrag.com/2007/sep/08/26651/

Ce que tu décris de Golden Sun a été fait aussi dans Morrowind. Au lieu d'avoir des vraies réponses à proposer aux pnj, on cliquait sur les éléments des dialogues qui nous intéressaient (des liens hypertextes, bleus et tout). On pourrait dire que ça permet de mieux s'identifier au personnage en laissant le joueur imaginer lui-même les lignes de dialogues mais bon euh...
Magnolia pousserait les hauts-cris. :fufu: Mais c'est qu'en tant que level-designeuse, elle est fondamentalement contre l'aléatoire dans un parcours, elle conçoit plutôt le placement des ennemis comme le placement de notes sur une partition (enfin la métaphore musicale est de moins, mais bon :nerd:) : parmi tous les possibles, trouver la meilleure composition pour provoquer tel effet à tel moment, à la suite d'un certain autre, en en précédant un autre.
Oui, je décris cette façon de procéder juste avant.

C'est la plus simple pour le game designer :
+Pas besoin d'une super IA pour les ennemis
+Difficulté du jeu facile à équilibrer
+Narration facile à mettre en place

Mais pour le joueur :
-Aucun choix d'approche
-Aucune replay value

En gros pour moi c'est un truc de feignasse (merde c'est pas comme ça que je vais faire revenir Magnolia, euh, se rattraper vite) mais bien utilisé on peut avoir des résultats excellents.

Minecraft utilise l'aléatoire.

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar Zim » 19 Juin 2011, 21:02

mais les éléments seraient diffusés petits à petits. En écoutant les conversations des PNJ, en lisant des lettres, en regardant des petites scénettes extérieures au joueur. Bioshock utilise tout ça et la qualité de sa narration est souvent saluée (même si je comprends pas trop, c'est utilisé tout aussi bien dans Deus Ex).
C'est exactement ce que je veux faire dans mon RPG, en inspiration directe de Dragon Quest. :awi:
Ce que tu décris de Golden Sun a été fait aussi dans Morrowind. Au lieu d'avoir des vraies réponses à proposer aux pnj, on cliquait sur les éléments des dialogues qui nous intéressaient (des liens hypertextes, bleus et tout).
Pas exactement bis. :nerd: (Je le sais pour avoir joué à ce jeu plus qu'à aucun autre. :awi:) C'est-à-dire que c'est intégré aux dialogues, et que, sauf pour les PNJ interchangeables, on n'obtient pas la même réponse selon la personne interrogée. Ça passe bien mieux, parce que ça ne vient pas interrompre le jeu, mais s'inscrit dans sa continuité : ça fait évoluer les quêtes, en initie de nouvelles, met en perspective les dires de différentes personnes...

Mais pour le joueur :
-Aucun choix d'approche
-Aucune replay value

En gros pour moi c'est un truc de feignasse (merde c'est pas comme ça que je vais faire revenir Magnolia, euh, se rattraper vite) mais bien utilisé on peut avoir des résultats excellents.
In b4 topic locké. :kyan:

Tu peux avoir plusieurs choix d'approche quand même. Dans Mario tu peux sauter au-dessus de l'ennemi, sauter dessus, balancer une boule de feu ; te placer ailleurs pour éviter le contact, passer en dessous quand il saute, l'aborder d'une hauteur différente, attendre qu'il se casse la gueule tout seul d'une plate-forme tout seul, te servir de lui pour atteindre une plate-forme inaccessible, t'en servir pour tuer un autre ennemi, le coincer de manière à obtenir des 1up infinis... Et tout ça est encore plus varié quand il y a plusieurs ennemis... Et puis tuer l'ennemi n'est pas l'objectif principal.
Mario est un des jeux avec la meilleure replay value, alors qu'il est scripté... Mais scripté dans l'ordre d'apparition des ennemis, pas des manières de les aborder. :)

PS : elle est en w-e, c'est tout. :nerd:

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar trotter » 19 Juin 2011, 21:26

Ok, tu parles de Mario. Effectivement, si les ennemis vivent leur petite vie en ignorant le joueur (même si c'est juste avoir un circuit) et qu'on a le choix de les aborder alors on entre dans le cas de figure décrit avec NOLF. Dans Duke Nukem par exemple, dans mon souvenir les ennemis attendent véritablement le joueur sans bouger (mais c'est toujours mieux qu'un script). a la fin du premier niveau par contre, un pigcop défonce le mur et tire sur le joueur, là c'est un script, impossible à éviter. Dans certains scripts d'Half Life il vont lancer la même grenade au même moment et se planquer au même endroit. J'espère que c'est plus clair. De toute façon ya pas de frontière nette entre tout ça, l'IA d'Half Life est pas mauvaise et même dans Far Cry on a à un moment des gars qui débarquent par hélico (mais qui sont assez intelligent pour rendre le truc agréable et varié).
Pas exactement bis. :nerd: (Je le sais pour avoir joué à ce jeu plus qu'à aucun autre. :awi:) C'est-à-dire que c'est intégré aux dialogues, et que, sauf pour les PNJ interchangeables, on n'obtient pas la même réponse selon la personne interrogée.
Ahah, tu veux dire qu'ils ont le même texte ? La lose, je pensais pas qu'ils étaient tombés si bas quand même. J'espère que ça ouvre un dictionnaire et que c'est pas raconté par le PNJ. Par contre l'analogie c'était pas vraiment ça, je reformulerais.

(Au fait j'ai répondu à "J'aimerais lire un développement de cette partie : pourquoi tu as été amené à mener ce projet, en quoi il consiste (les objectifs visés, sachant qu'il s'appelle "Projet sur la liberté et ses conséquences")" plus haut, je sais pas si t'as vu.)

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Re: Réflexions sur la notion de liberté, dans les jeux vidéo

Messagepar trotter » 23 Juin 2011, 01:11



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