La qualité pourrait être la même, mais la perception qu'on aurait d'elle changerait, à mesure que les limites qualitatives seraient repoussées (et dans la limite où ce gain qualitatif resterait perceptible).
En gros, ce que dit Zeus, quoi, mais dit de manière incompréhensible.
Tiens d'ailleurs j'ai fait exceptionnellement un tour sur le forum des Alex d'or (dans la section jury), j'essaie de persuader quelqu'un qu'on ne peut pas juger objectivement de la qualité d'un jeu, mais je n'arrive pas à le convaincre, du coup je doute de mon argumentation.
Petits extraits si vous avez un avis sur la question (je trouve que ça enchaine bien sur le débat précédent :
L'expression-clé est "cohérence de la partie avec le tout", ce qui fait de chaque jeu un cas unique. Le défi étant pourtant de lui attribuer une note relativement aux autres jeux. La solution adoptée est de noter les jeux sur une échelle réduite, sans doute imprécise ; mais la précision vient du fait que le jeu est jugé de nombreuses fois (ce qui dont requiert des jurés nombreux).
Cette imprécision est aussi un jugement au ressenti. C'est quelque chose en quoi je crois fondamentalement : je me fie avant tout à mes impressions, car je sais que ces impressions ont au moins une vérité : celle d'être les miennes. Évidemment, il est nécessaire de chercher la cause de son ressenti, et c'est là tout le travail critique du juré.
J'ajouterai pour terminer que ces jugements ont à mes yeux plus de valeur que d'autres, car ils permettent d'appréhender le monde avec les yeux d'autrui : ce que ne permettent pas les critères dits "objectifs", qui nient l'unicité du point de vue de chacun.
Se demander l'origine de ses ressentis permet justement d'en prendre ses distances elles sont trop hors de propos, ou de les mettre en avant lorsqu'ils trouvent leur origine dans l’œuvre même (sachant que moins ils sont personnels, plus il est acceptable de les mettre en avant dans le jugement qu'on rend).
Mais n'oublie pas que le mot-clé, dans cette optique, est "cohérence de la partie avec le tout" : juger qu'un jeu est bon parce qu'il y a ds chiens dedans et que j'aime les chiens ne dit rien sur le jeu, mais sur mes goûts. Le "ressenti" porte plutôt sur la cohérence (est-ce que ça me semble cohérent ? Pourquoi ? Est-ce que cette apparente incohérence est une cohérence de second degré ?).
Le problème des critères trop précisément définis, c'est qu'ils manquent de souplesse, et qu'il faut de la souplesse pour juger la qualité d'un jeu : des graphismes qu'on dirait "moches" peuvent s'inscrire dans une démarche où ils font parfaitement sens, et en cela ne doivent pas être machinalement sanctionnés.
Du reste, un critère en matières culturelles n'a jamais que la valeur qu'on lui accorde.
Ce qu'on veut dans ce concours, c'est pouvoir reconnaître même la qualité de ce qui est hors-normes, et c'est pour ça qu'il est nécessaire de considérer l’œuvre comme un tout, et de juger si les parties le servent ou desservent (la difficulté étant de saisir ce qu'est ce tout, ce qui est encore plus difficile si on s'en tient à des normes extérieures
(Et sur ce, je vais dormir, bonjour à toi Gaetz. :D )Bien évidemment que des critères de jugement seront donnés, mais avant tout comme des pistes. Mais je voudrais encourager l'autonomie de jugement chez les jurés, et le respect de l'esprit plutôt que de la lettre, qui est par nature déficiente car incapable de mettre en règles la complexité de la création (et de la réception).
Ma position pourrait se réduire à celle de Jean Rousset dans Forme et Signification, et plus précisément à cette phrase : « L'instrument critique ne doit pas préexister à l'analyse. »
Les critères les plus précis qui soient sont pour moi ceux qui tiennent compte des règles internes du jeu. Par exemple, il fait sombre dans un FPS, ça gène la lisibilité : on peut dire que c'est un défaut. Mais c'est une qualité si cette pénombre sert le gameplay et l'ambiance. Je peux multiplier les exemples, qui n'ont rien de flou, mais établir une norme extérieure au jeu conduit à des erreurs de jugement.
De même, on peut trouver extrêmement punitif un rogue-like, où la défaite, toujours présente, est sanctionne par la perte des progrès du personnage depuis des heures et des heures. Pourtant c'est un des charmes du rogue-like, communiquant des frayeurs comme peu d'autres jeux, et obligeant le joueur à s'approprier au mieux la complexité des règles s'il veut espérer survivre (un peu mal dit, mais il est tard).
(Note que dans tout ça, le ressenti prime : "je trouve qu'on voit pas assez", "je suis frustré de devoir tout recommencer à cause d'une erreur bête" : mais est-ce que peut-être ne pas voir assez est intentionnel, et permet de m'offrir une expérience autre, celle de l'insécurité causée par la défaillance de notre sens le plus important pour agir, expérience autre - et pourtant valable - que celle à laquelle je m'attendais ; est-ce que ma frustration ne m'a pas offert, le reste du jeu, un délicieux sentiment de tension convoquant toutes mes facultés d'analyse, irreproductible d'une autre manière ?).
Tout jeu doit être considéré comme un cas à part ; et, si tu préfères que ce soit formulé ainsi, suivant des règles qu'il respecte plus ou moins, et qui lui sont propres.
Donc je répète : il y aura des critères de notation qui seront suggérés, mais à mon sens, ils sont insuffisants pour juger correctement de la qualité d'un jeu. L'esprit importe avant tout, pas la lettre. Ce qui ne peut se faire qu'en s'empêchant de juger une œuvre selon une norme qui lui est extérieure, et faisant attention avant tout à son propre rapport avec l’œuvre, à son ressenti.