1) Pourrais-tu te présenter, toi et tes jeux, pour ceux qui ne te connaitraient pas ?
Bonjour ! je m’appelle Gabriel, mais sur Internet je suis connu sous les pseudonymes d’Astram et de Dastrem. J'ai 22 ans, vis au Québec, et j'adore les jeux vidéo depuis tout petit.
Je crée, avec mon grand ami Joseph Kochman (alias Joe Monsters, et réalisateur cinématographique), une série de jeux-vidéo indépendants intitulée IParadise, qui se décline en deux autres séries annexes, IPGaiden et IParallele, et développée principalement avec les logiciels RPG Maker 2000 et 2003.
Gabriel, le héros principal de la série
Les épisodes se suivent, pour raconter une histoire de plus en plus complexe, servie au cours de chaque épisode par une grande variété de gameplays.
La série IPGaiden quant à elle met en scène des personnages majeurs rencontrés dans les IParadises, dans des aventures annexes à l'histoire principale. Cette série propose un seul type de gameplay par épisode, mais pas nécessairement le même gameplay pour tous les épisodes.
La série IParallele, au contraire de la série IPGaiden, met en scène soit des personnage ayant été très peu présents dans la série principale, soit de tout nouveaux héros qui lui sont propres. Elle se situe aussi à une autre époque que l'ère moderne des IParadises. Du point de vue du gameplay, la série est similaire à la série IPGaiden.
Les IP peuvent être joués dans le désordre, toutefois il est conseillé (mais non nécessaire) de commencer d'abord par le tout premier, IParadise Life Zone, qui est la base de tous les autres.
À ce jour, nous avons créé cinq jeux complets, de plus un film, CM^3.5, a été réalisé par Joseph Kochman, qui sortira en salle le 28 novembre 2009 - c’est-à-dire ce mois-ci au moment où j’écris ces lignes - avant d’être disponible sur internet.
2) La création n’est pas chose aisée. Pourquoi avoir fait le choix d’y consacrer autant d’efforts ?
Eh bien, je ne peux m'arrêter de créer des jeux parce que c'est l'une de mes grandes passions : j'adore imaginer et mettre en œuvre des histoires en relation avec celles que j'ai déjà racontées dans d'autres de mes jeux.
Mais il est vrai que créé un jeu n'est pas facile, j'ai moi même eu beaucoup de difficultés en la matière, et ce pendant au moins cinq longues années, à compter de 2000-2001.
Je créais des jeux, mais je n'arrivais jamais à les finir, je passais souvent à autre chose, par manque d'imagination, et de concentration sur un seul projet.
J'avais également souvent eu des soucis informatiques (virus, changement d'ordinateur, formatage, etc), avec pour conséquence que je perde plusieurs de mes anciens projets.
Et l’expérience venant, la tâche m’est apparue progressivement plus aisée, et j'ai ainsi pu finaliser mon tout premier jeu, IParadise : Life Zone.
3) Le personnage principal de la série s'appelle Gabriel, comme toi, et vit au Québec, comme toi. Y a-t-il beaucoup de personnages du jeu inspirés de personnes en chair et en os ? Pour quelle raison avoir décidé de mêler ainsi réalité et fiction ?
Il y a en effet beaucoup de personnages du jeu inspirés de personnes en chair et en os.
Cela s’est fait presque sans réfléchir : mes tous premiers essais avec le logiciel RPG Maker me mettaient en scène avec mon frère et mon ami Carl. Le premier jeu s’appelait même (j’en ai honte en y repensant) : Final Fantasy : Starring Carl & Gabriel.
On a tous été jeune, dira-t-on !
Par la suite, comme clin d’œil à ces débuts pour le moins glorieux, j’ai repris ces personnages, et j’ai décidé de perpétuer cet usage, en intégrant d’autres personnes à qui je voulais rendre hommage, comme Joe Monsters, ou encore Yann, connu sur Internet sous le pseudonyme de YF06.
Évidemment, donc, l’histoire d’IParadise est loin d’être réelle, elle se passe dans un monde imaginaire parallèle au nôtre.
Interactive Paradise : un paradis interactif.
C'est cela.
La mappemonde d'IParadise: Life Zone
J'ai remarqué ce procédé il y a très longtemps dans la série des Dragon Quest.
Les trois premiers en effet sont tous liés entre eux, et si on y joue dans l'ordre de numérotation, et qu'on arrive à tous les finir... on se rend compte de multiples co-références donnant une unité aux trois jeux, lesquels profitant chacun de la richesse des deux autres, acquièrent des dimensions proprement épiques.
Je trouve ce procédé magnifique, car il permet de créer des mystères dans certains jeux, et de les résoudre par la suite dans d'autres.
Ce qui est stimulant pour le joueur s’il sait se prendre au jeu !
Oui ! J'adore imaginer la réaction du joueur d’un de mes jeux quand il verra telle référence à tel autre de mes jeux auquel il aura précédemment joué.
Bref, c'est pour moi une source de motivation énorme.
J’aimerais enfin revenir sur la question des références à d’autres jeux : à vrai dire mes références ne se limitent pas nécessairement à des jeux : ainsi, l’une d’elles majeure, c’est celle à la série télévisée Dead Zone, qui a été le premier fil de la trame scénaristique d’IParadise. Ce n’est pas pour rien que le premier jeu s’appelle IParadise : Life Zone !
Life Zone au lieu de Dead Zone… Une référence, mais adaptée, transposée. J’y vois là le symbole même de la capacité qu’a cette série de s’approprier au lieu de plus stérilement copier comme d’autres le feraient.
C’est un peu exagéré, mais soit !
5) L’on trouve dans tes jeux plusieurs types de gameplays, mais l’un d’eux particulièrement retient l’attention pour son originalité : l’Automatic-Action-RPG, apparu dans IParadise Gaiden : Le Château du Souvenir. Pourrais-tu nous en dire plus ?
J'ai imaginé ce concept d’Automatic A-RPG lors d'un des concours de création de jeux d’E-Magination Games.
Je voulais créer un jeu, mais ne voulais pas utiliser le système de combat au tour-par-tour du logiciel RPG-Maker. Par ailleurs, il est extrêmement difficile de programmer un A-RPG sous RPG Maker du fait de certaines limites techniques, et de toutes manières je n'avais pas le temps, il ne me restait que deux semaines.
J’ai donc trouvé une sorte de compromis : le A-Action-RPG. Ce système de combat se déroule comme suit : quand le héros touche un monstre, ce dernier meurt, et fait perdre automatiquement au héros un certain nombre de points de vie. Puis le héros reçoit de l'or et de l'expérience, automatiquement encore une fois. Autrement dit il n'est pas question, contrairement à un Action-RPG, de timing pour porter ses coups et éviter ceux des ennemis, mais de gérer au mieux ses points de vie en tenant compte de divers paramètres.
Je compte m'inspirer de Wonderboy et de Zelda dans la construction des donjons des jeux à venir qui utiliseront ce gameplay, à savoir IParalelle : Medieval Saga 1 + 3 (qui inclut donc le remake du premier IPMS) et probablement un autre jeu, dont je ne peux malheureusement citer le nom.
IPGaiden : Le Château du souvenir, le premier A-Action-RPG
Avant de me lancer dans la création d’un nouveau jeu, il faut qu’auparavant il ait reposé trois mois dans ma tête : s’il y reste autant de temps, et vif, et obsédant, c’est tout bon, il faut lui donner réalité.
Je détermine ensuite le gameplay avec le plus de précision possible, tout en réfléchissant sur le scénario : dont je m’efforce d’explorer les potentialités inexploités, tout en veillant attentivement à lui faire prendre racines - en multipliant les références aux autres jeux - dans l'univers de la série. En y réfléchissant, je ne crois pas que je procède d’une manière toujours la même : ainsi pour IParallele Medieval Saga 2, ce n’est qu’après avoir conçu la mappemonde, en y indiquant divers lieux, que j’ai commencé d’y développer une histoire : alors même, donc, que j’avais entamé déjà la programmation !
Enfin mon rythme de travail une fois lancé peut varier énormément : parfois j’avance tout d’une traite, jusqu’à temps que ce soit fini ; ou bien la production est saccadée, pour cause de démotivation chronique, mais la passion toujours fini par revenir ! Je termine un jeu programmé intensivement en deux ou trois mois en général.
7) J’aimerais connaître l’avenir de la série : à quoi aurons-nous droit par la suite ?
Je ne sais pas vraiment quel prochain jeu sortira, tout déprendra de ma motivation.
Il y a une chose dont vous pouvez être sûrs, c'est que Joseph Kochman et moi, on a énormément d'idées !
Aurez-vous droit à un nouveau jeu décrivant un univers post-apocalyptique, ou un univers médiéval ou encore un univers pré-historique ? Seul l’avenir nous le dira !
Une image en avant-première d’IParallele Medieval Saga 3
Je conseille aux créateurs qui débutent de jouer énormément à de vieux jeux-vidéo (NES, SNES, Megadrive) de tous genres, qui exposent plus clairement que jamais la base des principaux gameplays, et même en fait de jouer au plus de jeux possible, anciens ou récents : cette culture est une aide extrêmement précieuse pour stimuler son imagination !
Je recommande par ailleurs d’éviter les longs tutoriaux, et de rendre le gameplay le plus intuitif possible.
Le signe qu’un gameplay est suffisamment intuitif, c'est qu’il n’y a pas besoin de longs tutoriaux, n’est-ce pas ?
C’est cela même. Dans le même ordre d’idée, ne pas imposer de dialogues plus que nécessaire…
Car après tout un jeu est fait pour être joué : tout moment où le joueur est contraint à l’inaction est potentiellement frustrant.
D’autres conseils ?
Au moment de la conception, mieux vaut commencer par définir le gameplay et l’univers de son jeu, pour ensuite seulement s’attaquer au scénario.
Le gameplay étant dans un jeu ce qui importe le plus, il est en effet plus judicieux d’adapter son scénario au gameplay que l’inverse, si l’on veut conserver à ce dernier une efficacité sans compromis.
Quel mauvais intervieweur qui ne laisse pas parler l’interviewé !
Est-ce ma faute si le sujet m’intéresse ?
(Rires)
Enfin, mon dernier conseil, et peut-être le plus important : faites ce que vous aimez !
9) A quels jeux amateurs, à part les tiens, conseillerais-tu aux lecteurs de jouer ?
Si vous aimez les RPGs classiques, je vous recommande chaudement Laxius Power et Blades of Heavens d'Indinera Falls. Le premier offre énormément de liberté d'exploration, et le deuxième possède un gameplay tout bonnement excellent.
Je mentionnerai également Valor Adventure : Attack of Santa de CCD-TOF, peut-être pas exempt de défauts, mais qui m’a plu autant qu’un Final Fantasy.
Si les Click & Point sont plus de votre goût, courez télécharger Majix, de Joe Monsters !
Enfin, si vous êtes plutôt jeux de courses, il serait impensable de ne pas mentionner les hacks de FZero X (sur Nintendo 64) de Relm !
Un dernier mot pour la fin ?
Merci pour cette interview, et je souhaite un « bon jeu ! » à tous.